Tout le monde, dans son petit bagage de vie, posséde une ou plusieurs anecdotes sur des bêtises jamais avouées, des punitions injustes sans avoir rien fait ou que sais-je encore. Moi, il y en a une que je remets sur le tapis à chaque Noël et immanquablement, je vois toutes ces têtes autour de la table qui ricanent et se gaussent de plus en plus fort à l'écoute de la récurrente et hilarante histoire de cette "adorable Charlotte qui vit dans ses fantasmes".
Il y a les trois quarts de ma vie, mes parents nous emmenaient, mon frère, ma soeur et moi, tous les étés en Bretagne, dans une maison magnifique avec un immense jardin, un chouette cabanon qui a dû faire le bonheur de mon frère alors adolescent et une super piscine, le tout à flanc de mer.
L'été en question, je venais juste d'apprendre à nager. Et alors que je me lançais pour la première fois dans le grand bain sans mes brassards tout en faisant le clown pour m'assurer les regards de l'assemblée, je fus prise d'un fou rire tel qu'il m'était impossible, moi pauvre petite chose encore toute faible, d'exécuter le moindre mouvement pour me maintenir à la surface de l'eau. Pendant que je me débattais pour tenter de survivre tout en absorbant des hectolitres d'eau à cause de ce fou rire, par définition incontrôlable manifestement quelle que soit la situation, tout le monde applaudissait mes talents d'actrice sans bouger le moindre petit orteil pour me sauver des eaux.
Ayant par miracle réussi à rejoindre le bord, m'étant extirpée du fatal bassin et après avoir craché et récupéré mon souffle, je me suis mise à hurler et pleurer "VOUS M'AVEZ LAISSEE MOURIR" (les fans de John Irving penseront à Owen Meany). Mais personne ne me croyait.
Aujourd'hui encore, quand je tente de leur expliquer que je me noyais vraiment et que j'ai eu la peur de ma vie, tout le monde me taquine en me disant que je devrais enfin sortir de mon rôle de victime (!).
C'est trop injuste.